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Le quartier des Marolles

Extrait des « Mystères de Bruxelles », Suau de Varennes, 1844 (11 ans avant la création de la place du Jeu de Balle et 22 ans avant que soit posée la première pierre du Palais de justice). On y retrouve, toutes proportions gardées, un discours encore tenu aujourd’hui sur ce quartier et les modes de vie de ses habitants.

A partir de la rue de l’Épée et de la rue du Miroir jusqu’à la Porte de Hal, la rue Haute est coupée à droite et à gauche par une infinité d’autres petites rues étroites, tortueuses, immondes, qui forment différents quartiers, confondus généralement sous la dénomination de quartier des Marolles.

L’imagination la plus sombre créerait avec peine un tableau plus repoussant que celui offert par l’ensemble de ce quartier.

On dirait que de chaque côté des rues les maisons sans nivellement, basses, affaissées, s’enfoncent dans un bourbier infect, tant les chaussées sont malpropres, fangeuses et mal pavées.

Les égouts sont inconnus au milieu de ces étranges demeures, de sorte que les eaux, privées d’écoulement, y croupissent et exhalent des miasmes pestilentiels, morbifiques, qui empoisonnent l’air, dont la circulation est devenue impossible au milieu de cet amas de constructions ignobles, entassées les unes sur les autres.

Les ruelles, les passages, les cours et les impasses sont encombrés par des tas de fumier et d’immondices fétides, autour desquels les eaux pluviales et de lessive forment des mares stagnantes, noirâtres, méphitiques, dont les produits liquoreux s’infiltrent dans le sol d’où s’échappent incessamment des émanations épaisses et fiévreuses.

Aussi la population nombreuse qui pullule et fourmille au milieu de ces rues infectes parait-elle arrivée à l’état complet de crétinisme.

Les hommes au visage hâve et famélique, d’une vieillesse précoce, quoiqu’à la fleur de l’âge, s’y traînent sous des vêtements en lambeaux recouverts de saletés, jetant autour d’eux une odeur fade et nauséabonde, odeur d’ordure, odeur d’exsudations maladives.

Les femmes en guenilles, débraillées, les cheveux ternes et en désordre, les joues décharnées, les pommettes saillantes, le teint pâle, chlorétique, s’y tiennent accroupies sur le seuil des portes.

Quant aux enfants, ils se roulent et s’ébattent sans force, sans joie, sans sourire au milieu des bâillements de la faim et des contorsions de la souffrance.
Les uns ont le ventre gros, et les membres émaciés ; les autres, maigres, chétifs, ont la colonne vertébrale recourbée, presque tous ont le cou couturé, ou garni de glandes, les doigts ulcérés et les os gonflés et ramollis, leur ventre morbide sert de pâture aux insectes de toute nature.

Voila pour l’extérieur.

On pénètre à l’intérieur de ces masures par des trous voûtés de quatre à cinq pieds de haut. Chaque chambre est un taudis de six à huit pieds carrés environ, qui ne reçoit le jour et l’air que par une ouverture garnie de châssis à vitres noires, enfumées, et souvent remplacées par des morceaux de papier jaune et huileux.
Quelquefois deux familles, chacune de sept à huit membres, grouillent pêle-mêle dans une seule de ces chambres, au milieu de quelques poteries brisées et de vieux meubles gras et vermoulus.
La cour de service, pour toutes les familles d’une même maison est un cloaque impur, rempli de pourriture et d’immondices de toutes sortes.
A peine si l’épaisse obscurité permet d’apercevoir à droite le trou aux cendres, à gauche, le trou à d’autres ordures! au milieu le trou aux eaux grasses et ménagères.

La puanteur qui s’en exhale est telle, qu’il serait impossible aux personnes qui n’y sont pas habituées, d’y demeurer quelques minutes sans tomber asphyxiées.

Beaucoup de ces maisons contiennent plusieurs chambres où s’offrent les spectacles les plus hideux, où s’accomplissent les mystères les plus dégoûtants.

Ici une mère, jeune encore, pauvre créature déshéritée, dans un état presque complet de nudité, sans nourriture, sans feu, le sein desséché par la fièvre et la misère, presse son enfant entre ses bras amaigris, cherchant à communiquer un reste de chaleur à ce pauvre malheureux qui expire sur ses lèvres.

Là un père de famille gît sur un tas de chiffons, en proie à des chaleurs putrides, privé de tous secours et de tous remèdes ; le cadavre déjà glacé de sa femme est étendu à ses pieds, ses enfants haves, décharnés, brûlants de soif, dévorés par la faim se traînent à ses côtés, en poussant des cris plaintifs qui n’obtiennent de leur père qu’un regard de désespoir.

Plus loin, père, mère, vieillards, adultes et enfants des deux sexes, tous ivres de genièvre ou d’eau-de-vie de grains, se pressent et s’entassent sur le même grabat…

Ici nous nous arrêtons devant une peinture que notre plume se refuse à retracer.
Et n’est-on pas saisi d’indignation quand on songe qu’un pareil quartier existe non loin d’autres demeures élégantes, somptueuses, dont les habitants nagent au milieu du luxe et de l’abondance!

N’est-ce pas à désespérer de la société et de ses lois que de les voir tolérer, protéger même, l’infâme cupidité de ces propriétaires plus infâmes encore, qui ont créé et maintiennent cet enfer terrestre dont la mort, les vices et le crime se disputent l’empire.

Mais que l’on y prenne garde ! Le châtiment de tant d’insouciance et de sécheresse devant tant de misères et d’horreurs n’est peut-être pas éloignée.
Ces antres empestées sur lesquels l’égoïsme jette à peine un regard de dédain et de dégoût, ne semblent-il pas ouvrir leurs bras à l’épidémie? — que cette louve vorace vienne à s’y jeter, et dans sa rage aveugle elle ne tardera pas à se précipiter au milieu des demeures splendides et dorées ; alors la mort, agitant son squelette en signe de joie, viendra également s’asseoir implacable, terrible, au chevet du pauvre et à celui du riche.

En vérité, ne dirait-on pas qu’une sorte de fatalité, qu’une puissance occulte ait voulu que tout fût triste et lugubre dans le quartier maudit dont nous venons d’essayer de donner une faible peinture ?

Les désignations des rues ne portent-elles pas elles-mêmes le cachet de sa hideuse excentricité?
Ne frissonne-t-on pas involontairement en prononçant ces noms de : rue des Rats,— rue du Faucon ,— rue du Bout du Monde, — Allée des Prêtres, — rue de l’Epée, — rue des Vers, — rue du Renard, et tant d’autres non moins sombres.

Et maintenant que notre faible voix doit se borner à dire notre vœu et notre espérance de voir bientôt tant de maux et tant d’horreurs disparaître sous des mesures éclairées et charitables, poursuivons notre récit. (…)

Veut-on vraiment laisser la place du Jeu de Balle à une société de parking ?

Un texte de Gwenaël Breës, 06/12/2014

Les 15 premières minutes de l’émission « Les experts » de Télé Bruxelles ce samedi 6/12 concernent le projet de parking sous la place du Jeu de Balle. J’ai été sidéré à la vision de ce débat…

– Sidéré d’entendre qu’après deux semaines de forte mobilisation contre le parking, plusieurs journalistes en sont encore à se demander si celle-ci émane du quartier ou si elle n’existe que sur les réseaux sociaux (l’un d’eux allant jusqu’à suggérer que l’opposition à ce parking  pourrait être une forme d’opposition personnelle à Yvan Mayeur) ! Y a-t-il vraiment besoin d’un débat avec autant d’invités pour pour poser de telles questions ? Ne vaudrait-il pas mieux passer quelques heures dans les Marolles à discuter avec les habitants, marchands et commerçants, à écouter les conversations, à sentir l’ambiance, à observer le nombre d’affiches collées sur les vitrines, les pétitions qui circulent sur le marché et dans les commerces…?

– Sidéré d’entendre Faouzia Hariche (PS de Bruxelles-Ville) prétendre mettre les points sur les « i » dans un dossier dont elle ignore manifestement les tenants et les aboutissants. Mais personne sur le plateau ne la rectifie quand elle se trompe dans les grandes largeurs. C’est anecdotique lorsqu’elle insiste sur le fait qu’on parle du quartier de « la Marolle » et non « des Marolles », alors qu’il est de notoriété historique que la Marolle se limite à quelques rues situées en amont de la rue Haute derrière l’hôpital Saint-Pierre, le Jeu de Balle n’en faisant donc pas partie. Ce l’est moins lorsqu’elle tente de justifier le projet de parking par le problème de stationnement des camionnettes des marchands « à la rue du Midi », alors que c’est sur le boulevard du Midi et sur la rue des Brigitinnes que se trouvent les emplacements destinés à ces camionnettes, mais surtout que ce système fonctionne bien depuis plusieurs années, même s’il pourrait être amélioré par un système de réservation et de vignettes pour les marchands.

– Sidéré que le bourgmestre Yvan Mayeur puisse déclarer sans contradiction (mardi, toujours sur le plateau de Télé Bruxelles) que le parking du Jeu de Balle n’est pas lié au nouveau plan de circulation ! Les journalistes n’ont manifestement pas lu ce plan dont ils parlent tant ces dernières semaines… Normal, il n’est toujours pas public ! Par contre, la présentation écrite qui en a été donnée au Conseil communal et les cahiers des charges des parkings sont des documents accessibles, ils viennent d’ailleurs d’être votés par Mme Hariche et ses collègues. Ce sont des sources de premier ordre, qui constituent la base légale à laquelle les prétendants concessionnaires auront à répondre. N’importe qui prend la peine de les lire peut constater que ce parking fait bel et bien partie du plan de circulation.

Contrairement à ce qu’affirme Mme Hariche, la seule fois où le mot « marché » est utilisé dans le cahier des charges pour désigner autre chose qu’une attribution de marché public, c’est dans une phrase courte et sibylline (« Il y a lieu de maintenir au maximum le marché durant les travaux. »), ne donnant aucune garantie sur le maintien du Vieux Marché pendant les travaux. D’ailleurs, l’Echevine du Commerce Marion Lemesre elle-même a plusieurs fois contredit sa collègue Els Ampe en déclarant publiquement que le Vieux Marché serait déplacé pendant le chantier. Or, on sait qu’il n’existe pas d’espace assez grand dans les environs pour accueillir tous les marchands et qu’un déménagement « le temps du chantier » signifierait la mort annoncée de nombreux commerces. Mme Lemesre, qui a parfois le mérite de la franchise, a même déclaré voir des avantages à ce déménagement et aux transformations commerciales et sociales qu’il pourrait créer dans le quartier…

Alors, à quoi bon organiser un débat télévisé avec des invités qui n’ont que des opinions personnelles sur les questions posées ? Il y a des faits, des déclarations, des documents. Leur lecture suffit, par exemple, à constater que rien n’est prévu quant au maintien des pavés contrairement à ce que clame M. Mayeur. Ou à découvrir en toutes lettres que l’entreprise qui sera retenue pour construire le parking (Interparking ?) bénéficiera d’une concession de 35 ans… et se verra confier la responsabilité de réaménager les espaces publics autour.

Quant à « l’affaire du bunker », dénoncée par Mme Ampe comme une « instrumentalisation du patrimoine », il n’aura pas échappé à l’observateur attentif qu’elle est née dans les médias, suite à la publication de photos de l’abri anti-aérien sous la place du Jeu de Balle. Ces photos ont été prises par un explorateur urbain qui les avait gardées secrètes « pour éviter que l’endroit soit dérangé par d’autres », jusqu’à l’annonce du projet de parking. Voilà pour ce qui est de « l’instrumentalisation ». Par contre, il existe bien un sentiment partagé par de nombreuses personnes à Bruxelles que cet abri constitue un patrimoine à préserver, bien plus important qu’un parking. Ceux qui en connaissaient l’existence n’avaient pas besoin d’en demander le classement, puisque le lieu n’était en rien menacé. Et ceux qui tiennent à la place du Jeu de Balle comme elle est, n’ont pas besoin de trouver de prétexte pour le dire. C’est d’ailleurs le classement intégral de la place, de ses sous-sols et de son activité qu’ils sont tentés de revendiquer.

Dans ce contexte d’opacité et de passage en force, M. Mayeur ne doit pas s’étonner d’une telle mobilisation. C’est son projet commun avec Mme Ampe et leur méthode qui ont réussit l’exploit de fédérer autant d’opposants en si peu de temps… Accuser ceux-ci de faire de « l’intox », c’est une ficelle un peu grosse lorsqu’on tente soi-même de faire passer des pommes pour des poires un jour, et pour des fraises le lendemain.

Se rend-il compte qu’en accusant les élus Ecolo-Groen d’avoir agité et mobilisé la population, M. Mayeur confère non seulement à ces partis une force de mobilisation qu’ils n’ont pas, mais aussi qu’il offense tous les habitants qui ont un cœur pour ressentir, des yeux pour voir, des oreilles pour entendre et un cerveau pour réfléchir ?

 

Lettre d’un marollien insurgé

Un texte de David Marolito, 03/12/2014

Je m’appelle David, sobriquet «marolito» , fils d’exproprié de la rue des Radis (Quartier des Marolles). Développer un discours technique sur l’inutilité de ce parking m’importe peu, d’autres réalisent déjà un merveilleux travail sur l’aberration logistique de ce projet délirant.

Je souhaite à partir de mon histoire construire un récit sur les luttes populaires du quartier des Marolles. Mon discours sera donc incarné. Comme le blues incarne le corps d’un noir, descendant d’esclave. Une nouvelle bataille face à la violence de l’urbanisme bureaucratique se dresse contre nos corps, nos vies, nos mémoires et nos langues.

Ma langue, le «marollien», je ne la parle presque plus. J’en connais les insultes et les drôleries. Je peux encore crier et rire. Ma grand-mère toujours en vie le parle sans accent, elle en connaît tout les gestes et les secrets. Ma mère le parle également mais s’en cache, car elle a passé son enfance sous les brimades et les humiliations de la bourgeoisie à cause de sa classe.

Ma mémoire, c’est une femme forte qui a connu la guerre et ne montre jamais quand elle a mal qui me l’a transmise. Une maison sans douche, un père envoyé en «camp de travail», les p’tits boulots ambulants de colporteuse, les charrettes à bras rempli de caramels et de nougats provenant d’un magasin rue des Radis, «Chez Janneke». Son frère lui, avait un bar, le «Volle Pot», le repère des Manouches brocanteurs ou musiciens du «Vieux Marché».
C’est de là que je viens. Même si je n’y suis pas né, ce sont mes racines, celles que l’Etat à voulu arracher comme de la mauvaise herbe. Il a démoli nos maisons et nos rues en parlant de «dératisation» de nos impasses populaires. Je suis né sur les routes de l’exil forcé dans un logement social de Molenbeek, à quelques kilomètres de là.

Nos gueules dérangent car nous sommes un quartier de bâtards. Depuis plusieurs siècles des vagues d’immigration se sont installées dans le quartier. Les Espagnols durant les conquêtes de Charles Quint, Les Manouches, les Juifs fuyant la misère et les persécutions en Europe de l’Est… Cette histoire là, elle se lit sur nos visages.

L’acharnement de l’urbanisme bureaucratique depuis deux siècles sur ce quartier s’explique peut-être aussi par le racisme de la bonne bourgeoisie blanche pour qui nous sommes une «race de dégénérés», «des chiffonniers impurs» aux manières rustres et peu catholiques, baragouinant un obscur dialecte créole qui ne s’écrit pas dans les livres. C’est pour cela que tout les immigrés qui s’installent aujourd’hui dans le quartier sont mes frères. C’est notre «Jeu de Balle», celui de la vendeuse de «caricoles», du brocanteur marocain et du ferrailleur gitan.

La bourgeoisie branchée, ce sont mes ennemis de classe qui colonisent notre territoire avec leurs restaurants chics, leurs magasins «vintage», leurs bars où tout est cher, où résonnent des musiques insipides qui ne racontent plus rien. Prisonnier de ce «monde de paraître», ils nous regardent comme des êtres exotiques rempli d’authenticité. Ils détestent nos «manières» et nos dialectes autant qu’ils admirent notre franchise et notre «parler populaire». «Je me méfie autant de ceux qui détestent les noirs que de ceux qui les admirent» (Frantz Fanon). C’est à cause d’eux que nos loyers augmentent, dans un quartier sous le joug des marchands de sommeil.

La bourgeoisie qui souhaite se battre à nos côtés contre la gentrification des quartiers populaires, qui se détermine en tant que bourgeois avec une lecture politique qui ne nie pas les rapports de classes et d’exploitation, ce sont mes camarades aujourd’hui dans la lutte, et bien au-delà.

Nos vies dérangent, car elles se sont longtemps organisées en marge du «capital». Notre économie informelle de débrouille, nos ferrailleurs, nos chineurs, nos colporteurs… tout ça était bien trop anarchique. Il fallait cadrer, lisser et séparer. La télévision a aujourd’hui achevé le travail de l’urbanisme. Il reste bien quelques Apaches aux cernes de bidouilleur et au regard d’escroc, mais ils sont tellement peu nombreux qu’on ne devra même plus leur construire une réserve.

Dans la rue des Radis, la contrebande était organisée durant la guerre, de nombreux enfants juifs ont été sauvés là-bas. Les portes de nos maisons n’étaient jamais fermées. Il ne fallait pas nous appeler pour venir manger, nous partagions toujours nos marmites. Nos gosses jouaient au foot dans la rue. Nos vieux jouaient aux cartes dans la rue. Ce quartier porte une histoire de résistance et de luttes populaires qu’il fallait éradiquer, casser le lien social et familial en relogeant ses habitants ailleurs. La «vie en meute» ça n’est pas bon pour la consommation hystérique de marchandises.
Aujourd’hui, chacun reste chez soi. Les quelques survivants de cette époque se plongent dans l’alcool pour noyer leur solitude. Le soir, des ivrognes solitaires déambulent encore de bar en bar sous le regard de quelques touristes qui viennent consommer un folklore perdu. L’échevine de la mobilité a pensé à eux et défend l’idée d’un «petit train électrique» pour nos visiteurs, comme au zoo ou au parc d’attraction.

Le sol de la place est rempli de vie, son sous-sol est rempli de mémoire… mais peut-être aussi d’une vie a réinsuffler. En-dessous de la place du «Jeu de Balle» se trouvent des vestiges de la guerre (tunnel d’évasion/abris anti-aérien) mais également les bains publics, là où ma grand-mère et tout ceux qui n’avaient pas de douche allaient se laver. C’était notre «hammam marollien». C’est peut-être le moment de demander au pouvoir en place un lieu d’hygiène pour ceux qui vivent dans la rue. Mais nos mémoires populaires elles aussi sont a détruire, pour que nous ne puissions pas nous rappeler d’une époque où l’homme «blanc» vivait comme le «noir».

Le projet de notre maître non élu s’inscrit dans une logique de continuité de destruction et de sablonisation de ce quartier. Notre place peut devenir un lieu symbolique d’une résistance qui dépasse le simple refus de ce parking, comme la place Taksim à Istanbul. Passons à l’offensive pour notre quartier. Nous ne voulons pas de parking. Tu ne toucheras pas à un seul de nos pavés. Ils seront nos armes face à tes bulldozers. Nous allons démonter le Palais de Justice et ré-assembler la Maison du Peuple.

Un marollien insurgé contre le promoteur et sa fidèle épouse, la bureaucratie.

Signé : Le Parking de la Porte de Hal

Un texte de Damien Demoustier‎

Dans la presse, ce jour, on donne la parole à un acteur dont on entend beaucoup parler mais qu’on avait pas encore entendu s’exprimer !

Cher Mr Mayeur,

De mon sous-sol, j’observe comme il vous coûte de prendre le temps de vous mettre à l’écoute de vos administrés, comme il semble vous être difficile de tenir compte des arguments, des inquiétudes, des craintes, du bon sens parfois,… des gens qui vivent, fréquentent, travaillent dans ce quartier dont ils battent le pavé ou le caressent de leurs souliers ! J’espère, Mr Mayeur, que vous serez sensible aux propos d’un parking qui craint l’arrivée d’un nouveau concurrent !

Ma famille est dans la mobilité depuis de longues années. Mes plus vieux ancêtres étaient dans le transport « petit fluvial » sur les eaux de la Senne. Ils en voyaient du monde, des brasseurs, des tanneurs,… c’était la belle époque. Ca créait du lien entre les gens… un peu comme un vieux marché! Puis, avec le recouvrement, la famille a tout perdu. Certains se sont reconvertis dans les égouts, d’autres sont devenus de vulgaires « grattes-pieds de Bruxelles », ces espèces de ferrailles souvent posées à la droite des portes des maisons. De ces tâches ingrates, mes ancêtres se sont acquittés pendant de nombreuses années avant d’investir un filon en or : le stationnement. Les plus chanceux sont en surface, profite du temps qui passe. Les autres, comme moi, vivent sous la terre. C’est triste, vous savez Mr Mayeur, d’être sous la terre, d’être enfumé par les voitures qui passent dans un brouhaha insoutenable qui lorsqu’il s’apaise laisse place à une musique dont ne voudrait pas un ascenseur. Et ce qui est encore plus triste et difficile, c’est quand il n’y a pas de voiture… alors je me sens vide et je nourris le sentiment de ne pas assumer mes tâches, même ingrates, comme il se doit ! Voulez-vous donc ma mort en même temps que celle, lente et agonisante, de ce quartier et de son âme, Mr Mayeur ?

Je connais la concurrence et ses effets négatifs, on est nombreux dans la famille comme en atteste cette photo de nous tous.

On est tous là, enfin les souterrains sont là… parce qu’il y a les autres aussi et ceux d’autres familles ! S’il y des cousins éloignés, la plupart d’entre nous seront prêts à servir les intérêts de votre centre piétonnier. Tous ensembles, nous ne manquons sûrement pas d’arguments et de disponibilités ! Nous pourrons servir ces « gens las », ceux que les transports en commun ou qu’un peu de marche rebuteraient ! Je parlais de concurrence… elle est même rude au sein de la famille ! Depuis que mon neveu Poelaert est sous la place, je ne vois plus les robes amusantes et dansantes des avocats ! Ne laissez pas, Mr Mayeur, un arriviste aux dents longues me voler mes habitués ! J’ai travaillé dur pour les séduire tant ma signalisation laisse à désirer… peut-être pourriez-vous juste investir dans l’un ou l’autre panneau et « laisser venir à moi ces petites voitures »… comme dirait « 58 » notre père à tous !

Mr Mayeur, mon existence de parking souterrain m’a mis en contact avec d’autres édifices enfouis que parfois l’on oublie. Un Bunker… Mr Mayeur ! Ca c’est de l’édifice enfoui qui a de la classe ! Et vous voudriez le faire s’enfuir… à jamais ! Par les temps qui courent, socialement et idéologiquement, d’autres affectations jadis évoquées sembleraient plus judicieuses. Un musée pour la mémoire et un exemple de la Ville à l’état fédéral et certains de ses discours dégueulasses ! Un refuge pour sans-abris… moi, en tant que Parking, je pense que ça peut les aider… Vous pourrez convaincre certaines personnes, Mr Mayeur, en disant que ça les cachera ! Pensez au pire aussi, Monsieur Mayeur ! Avec tout ce qui se passe avec les réacteurs à Tihange, l’élite politique et idéologique de notre Ville aura plus besoin d’un bunker que d’un parking si elle entend survivre et reconstruire la ville qu’elle veut !

Vous portez un nom qui, dans un autre temps et dans certaines régions, siérait à votre fonction. En ce jour, vous pouvez poser le choix de vous comporter en « Maître du Bourg ». Celui qui décide en tenant compte des arguments qui nourrissent ses choix, ses projets et ses ambitions. Vouloir à tout prix laisser sa trace dans l’évolution de notre Cité ou avoir son nom gravé sur la plaque en marbre que l’on intégrera à côté de la barrière, dans le mur d’entrée du parking. Bien vite certains ne verront que le panneau indiquant le tarif, Mr Mayeur. Mais d’autre se souviendront que ce flot de voiture, ces bouchons sans noms, ce bruit, cette pollution, cette défiguration de notre village porteront ton nom ! Vous pouvez aussi, Mr Mayeur, posez le choix de vous comporter en M(è)aire de vos administrés et prendre le temps d’entendre et d’écouter ce qu’ils portent sur le cœur et dans la tête. Une première solution s’impose… reporter cette décision et élargir le débat tant les questions se multiplient (parkings, mini-ring, impact sur le trafic et la vie des habitants,…)

J’espère Mr Mayeur que vous aurez pris le temps de vous intéresser à ce que je vis dans mon quotidien de parking souterrain et au fil des idées qui se tisse en moi.

Signé : Le Parking de la Porte de Hal

Des petits trous…

Chronique d’Alain Berenboom dans Le Soir, 01/12/2014

Paraît qu’ils veulent faire un grand trou aux Marolles pour y mettre les bagnoles qui passent par là. Désolé, on vend de tout au Vieux Marché, de faux Magritte, des vrais trombones à coulisse, de fausses Licorne à moins qu’elles ne soient vraies. Mais, des bagnoles, non. Et on a besoin de paix pour boire sa pintje tranquillement sur la place du Jeu de Balle avant de repartir à la chasse aux trésors. Sans engins de destruction massive. Alors, smeirlap, pas touche au Vieux Marché, asteblieve ! Puute van de koech ! Et tes mains chez toi !

Non mais… Qu’est-ce qui leur prend aux édiles de ravager Bruxelles toutes les quelques années ? Et cela dure depuis cent ans. Cent ans de destructions, toujours pour un mieux, hein ? Sauf que, quand les travaux pharaoniques sont finis, ceux qui les ont subis ne sont plus là pour en profiter. Faillis, déplacés, morts. Et la génération suivante des habitants non plus. Parce que la génération suivante des politiques s’est mise à son tour en tête de nettoyer ce que ses prédécesseurs avaient bêtement laissé debout…

De la démolition du centre populaire entre l’actuelle gare Centrale et la gare du Midi par la construction de la Jonction à l’éradication du merveilleux Mont des Arts. Et à la re-destruction du centre populaire des environs de la gare du Nord pour le remplacer par un quartier qui sera comme New York, si, si, on vous le garantit, le Manhattantje. Ah ! Les beaux discours sur l’urbanisme de demain agitant l’image lyrico-pompeuse d’un Brussels on Hudson de ces politiciens faussement modernes, Vanden Boeynants, Cudell et de leurs amis entrepreneurs-spéculateurs ! Résultat, trente ans de friches entre le canal et la place Rogier (à nouveau en plein travaux), l’allure de Dresde après le bombardement et, finalement, une série de tours immondes, énergivores, inhumaines et déjà obsolètes.

Pendant ce temps, la construction d’un viaduc ravageait tout sur son passage entre Rogier et la Basilique, puis rebelote quelques années plus tard avec la destruction de cette passerelle rouillée et rebelote encore avec un nouveau trou pour y glisser ce qu’on appelait fièrement le plus long tunnel de ville. Avec toutes ces « installations », pas besoin de chercher un musée d’art contemporain à Bruxelles, il est dans la rue…

Passons sur la destruction de toutes ces vieilles choses, telle la Maison du Peuple de Horta, magnifique cathédrale laïque, que le Parti socialiste a fait raser pour laisser bâtir à la place une tour trapue qui abritait le ministre de la Culture ! C’était évidemment l’époque où la mode était à la culture Ceausescu…

Si vous percevez dans ce billet de la rage pour ne pas dire de la bave aux lèvres, vous ne vous trompez pas ! Le ketje de Bruxelles aime sa ville comme la frite aime la mayonnaise.

Lettre ouverte

Lettre ouverte de Michel Deschuytere au Collège des Bourgmestre et Echevins et au Conseil Communal de la Ville de Bruxelles, 30/11/2014

Monsieur le bourgmestre, Mesdames et Messieurs les échevins, Mesdames et Messieurs les conseillers communaux,

Vous voterez ce lundi 1er décembre la première phase de la procédure concernant la construction d’un parking place du Jeu de Balle.

En préambule, il est important de comprendre que je suis, à la fois, président de l’Association des Commerçants du Quartier Bruegel et des Marolles et de l’Association des Amis du Vieux Marché, ces deux associations n’ont pas une position identique par rapport au projet de parking place du Jeu de Balle: le débat est animé chez les commerçants et l’unanimité se fait contre au Vieux Marché, mon regard est, donc, affuté dans des directions différentes…

En tant que commerçant, je suis convaincu que la gestion du parking d’une manière globale est aussi, si pas plus, importante que le nombre de places enterrées.
Il est évident qu’il y a un manque chronique de places dans le quartier.
Les parkings Poelaert et Porte de Hal sont très loin d’être saturés.
Nos clients n’y vont pas, ou pas assez, pourquoi ?
Les commerçants et leur employés non plus, pas plus que les autres navetteurs (mis à part ceux dont l’employeur loue les emplacements à leur usage), pourquoi?
Mauvaise signalisation, absence de campagne médiatique pour mette en valeur 10 minutes de marche, loyers mensuels trop élevés, manque de liaison et d’attractivité relative entre les prix en surface et en souterrain, peur d’agression, insécurité…

Des zones rouges (payantes pour tout le monde) rue Haute et rue Blaes permettraient une rotation permanente des places « commerciales » (toutes, ou presque, squattées en permanence par les détenteurs de carte riverain –qui peuvent, également, être achetée par les non-résidents-), ces zones devraient être combinée à une tarification réfléchie qui encourage la durée courte en surface et la durée plus longue en souterrain (surface : 1er ¼ heure = gratuit, 1ére ½ heure= 1€, 1 heure= 2€, 2 heures = 6€, les suivantes 5€/heure. Souterrain : 1 heure= 3€, 2 heures = 5€, 3 heures = 8€, par exemple…)

Une zone de parking camionnettes, boulevard du Midi, réservées aux échoppiers et commerçants du quartier (avec badge ou macaron) jouant un rôle de barrière entre les commerces existants de ce boulevard et l’autoroute urbaine de la petite ceinture dégagerait le quartier pour un coût dérisoire.

Un parking Place du Jeu de Balle, sans tenir compte des nuisances inévitables liées à sa construction, s’il n’est pas accompagné d’une gestion globale et rigoureuse de la problématique du stationnement et des livraisons, ne créera qu’un nombre supplémentaire de places inoccupées en sous-sol.

Nous avons rendez-vous avec Yvan Mayeur, Bourgmestre, en charge de la Police, de la Prévention, du Budget et des Grands projets, le 8 décembre.

Nous avons rencontré Els Ampe, Echevine de la Mobilité, des Travaux publics et du Parc automobile et Marion Lemesre, Echevine de l’Emploi, de l’Economie, de la Formation, du Commerce et du Plan de stationnement ce 25 novembre.

Le parking évoqué par Madame Ampe dépasse mes rêves les plus fous de président d’association de commerçants :

  • Un niveau réservé uniquement aux camionnettes des échoppiers et des commerçants quartier (nous n’avons pas eu le temps d’évoquer à quel tarif préférentiel).
  • Un niveau réservé, uniquement aux habitants du quartier, avec box individuels et des loyers de 50€/mois.
  • Quelques niveaux permettant au promoteur (essentiellement privé) de valoriser son investissement.
  • Un cahier de charges gérant les travaux pour éviter la majorité des nuisances et interdire tout retard.

Ma casquette de président des Amis du Vieux Marché me siffle à l’oreille les retards colossaux des chantiers « Chez Marcel » et « Cour de la Caserne » et celui, effroyable « rue des Tanneurs » où il faut tout recommencer suite à la qualité infâme des matériaux utilisés, et me montre aussi les engins de chantier, le charroi de déblaiement, la poussière, le bruit…

Une main innocente a, cependant, laissé choir entre mes doigts le dossier complet (comprenant les cahiers de charges) :

Quelques remarques :

Il n’y est aucunement précisé que les pavés de la place y seront replacés,

Au point 2.2
− La construction et le financement pour son propre compte d’un parking souterrain pour automobile (véhicule 4 roues), pour véhicules électriques, pour camionnettes, pour deux roues (motos et vélos), des emplacements privatifs ainsi que tous les équipements nécessaires à leur fonctionnement, y compris les voies et dispositifs d’accès pour voitures et piétons.

Le nombre d’emplacements de parking doit être déterminé en tenant compte du besoin tant des riverains que des fonctions existantes ou projetées à proximité suite notamment au nombre de places en surface qui vont être supprimées dans le quartier, à la configuration des lieux, aux objectifs de mobilité et aux contraintes du sous-sol.

Les prestations comprendront également à titre complémentaire : Le Concessionnaire a comme charge de réaménager la surface au dessus du parking réalisé ainsi que les abords. Le périmètre de réaménagement, soit le périmètre au sens large, s’étend donc à la place du Jeu de Balle et ses alentours.

Si on y parle de camionnettes et d’emplacement le volume de ces véhicules et le nombre de places reste d’un flou total et est extrêmement peu rassurant…
2.5. DESTINATION DU PARKING
Les emplacements de parking seront destinés à leur exploitation par le concessionnaire à un tarif horaire compétitif par rapport à ce qui se pratique sur le marché pour toute la durée de la concession.

Le concessionnaire mentionnera dans son offre le tarif horaire d’un emplacement de parking (heure/jour/nuit/week-end/mois/année), dans les formes prévues au Livre 4 du présent cahier spécial des charges.

  • Au point 1.2.4 II A on y parle bien de tarif pour les habitants mais pas pour les échoppiers ou autres commerçants locataires de la Ville
    Il y aura un taux maximum de :
  •  5 € / nuit (19h-7h) tous les jours
  • 10 € / jour (7h-19h) les weekends, les jours fériés et durant les vacances scolaires
  •  5 € / demi-journée (7h-12h ou 12h-19h) durant les weekends, les jours fériés et durant les vacances scolaires
  • La même tarification tous les jours de la semaine (en dessous des prix en surface)
  • Maximum 50 euros/mois pour les habitants de la Ville de Bruxelles

Dans l’annexe 4, les camionnettes disparaissent et la protection de l’activité n’est guère dynamique !
Le parking n’est plus local mais doit capter l’offre de véhicules de l’ensemble de la Ville…

ANNEXE 4 : CLAUSES TECHNIQUES
ART. 1 CT – OBJET ET LIMITES DE L’OBJET DU MARCHÉ
Le présent marché de travaux a pour objet la réalisation et l’exploitation d’un parking enterré sous la place du Jeu de Balle à Bruxelles.
Par parking enterré, il faut entendre l’ouvrage enterré ainsi que tous les dispositifs liés en surface (les rampes d’accès, les ascenseurs, les panneaux d’information dynamique…)
Les objectifs génériques du parking enterré sont :
– de proposer un nombre de places pour véhicules 4 roues attractif ;
– d’offrir toutes les conditions de confort et de sécurité contemporaines (hauteur, lumière, clarté, propreté, jalonnement, conditions d’ouverture, accueil des 2 roues, de véhicules électriques, des riverains, des participants aux manifestations culturelles…) et proposer un traitement architectural de qualité ;
– de « capter » les automobilistes qui souhaitent stationner au centre ville en proposant un équipement facile d’accès et très visible afin de contribuer à l’attractivité du centre et de limiter le trafic dans les quartiers proches ;
– d’assurer des conditions d’accessibilité optimales. Le parking doit aussi bien recevoir les visiteurs venant de l’amont que de l’aval de Bruxelles. Il ne doit pas générer de remontée de file sur la voirie publique et doit rester accessible tout le temps ;
– de soutenir les activités proches en leur offrant un service approprié ;
– de permettre de reconquérir les espaces publics en surface, au profit des modes doux et des circulations locales ;
– de respecter les options de mobilité définies au présent cahier spécial des charges ;
– d’organiser un réaménagement des espaces publics et le développement d’une nouvelle mobilité du site de manière globale, concertée et visant la qualité et la convivialité ;
– de ne pas entraver l’accessibilité aux fonctions locales lors de sa réalisation;

Un étage pour les camionnettes, un étage pour les riverains nous a dit Madame Ampe ce mercredi, au vu du & ci-dessous cela correspond à une profondeur de 20 niveaux (10% soit +-70m) ou 5 niveaux (40% soit +- 25m) suivant le texte ci-dessous, sur une surface de plus de 5.000 m2, un beau volume de terre à évacuer…70×5.000= 350.000 m3, 25×5.000= 125.000 m3
Pour soutenir les fonctions et l’habitat riverains, le concessionnaire devra prévoir des formules d’abonnement pour les riverains de minimum 10% à maximum 40% des emplacements de parking prévus.
Le Concessionnaire a comme charge de réaménager la surface au dessus du parking réalisé ainsi que les abords. Le périmètre de réaménagement, soit le périmètre au sens large, s’étend donc à la place du Jeu de Balle et ses alentours.

Nous n’avons pas eu le temps de faire une lecture en profondeur de ce cahier des charges, ces premières remarques montrent, quand même, qu’un remaniement d’une partie de ce texte est nécessaire et nécessite, absolument, un report du vote de ce lundi afin de partir d’une base acceptable, sinon par tous, au moins par certains…

Ci-dessous, les remarques de Monsieur Anton Van Assche, Adviseur Brusselse Aangelegenheden & Arbeidsmigratie UNIZO-Studiedienst , peu susceptible d’être confondu avec un bobo gauchiste et dont l’expérience de lecture de projet urbanistique est nettement supérieure à la mienne…

NB: Il est bien entendu que ce texte est publié sous ma seule responsabilité.

Veuillez agréer, Monsieur le bourgmestre, Mesdames et Messieurs les échevins, Mesdames et Messieurs les conseillers communaux, l’expression sincère de mes sentiments les plus respectueux.

Deschuytere Michel
Président
Associations des Amis du Vieux Marché
Association des Commerçants du Quartier Bruegel et des Marolles


ANNEXE

Monsieur Deschuytere,

Voici quelques éléments qui méritent notre attention :

1. Combien de places et lesquelles ?
Dans la description, on mentionne : “La construction et le financement pour son propre compte d’un parking souterrain pour automobile (véhicule 4 roues), pour véhicules électriques, pour camionnettes, pour deux roues (motos et vélos), des emplacements privatifs ainsi que …”. Egalement dans la fiche technique on mentionne ‘des camionnettes’. On indique également : Les espaces de circulation automobile et piétonne doivent avoir une hauteur libre minimale de 2 m. Mais combien de place pour camionnettes ? Quelle type de camionnette ?

Le nombre d’emplacements de parking doit être déterminé en tenant compte du besoin tant des riverains que des fonctions existantes ou projetées à proximité suite notamment au nombre de places en surface qui vont être supprimées dans le quartier, à la configuration des lieux, aux objectifs de mobilité et aux contraintes du sous-sol. Aucun mention sur le méthode de calcul de ces besoins (l’annexe 4 mentionne une méthode d’analyes des effets sur la mobilité) ?

Pour soutenir les fonctions et l’habitat riverains, le concessionnaire devra prévoir des formules d’abonnement pour les riverains de minimum 10% à maximum 40% des emplacements de parking prévus. Ce n’est pas une garantie – on ne sait pas de combiein de place on parle.

2. Réaménagement de la place

Les prestations comprendront également à titre complémentaire (c’est quand même 30 points dans les critères d’attribution) : Le Concessionnaire a comme charge de réaménager la surface au dessus du parking réalisé ainsi que les abords. Le périmètre de réaménagement, soit le périmètre au sens large, s’étend donc à la place du Jeu de Balle et ses alentours.
Mais à l’ ART.4 CT – DESCRIPTION DES OBJECTIFS DE REAMENAGEMENT DE L’ESPACE PUBLIC
rien sur une concertation avec les riverains, uniquement des ‘réunions d’information des riverains sur l’état d’avancement du dossier seront organisées par les autorités communales’.

3. Travaux
Le concessionnaire s’engage à construire, équiper, mettre en exploitation le parking souterrain et à aménager le périmètre de la concession au sens large dans un délai maximal de 30 mois à compter de la date de conclusion du marché. Ce délai maximal comprend également l’obtention des permis nécessaires afin de construire, équiper et exploiter le parking, ainsi que l’aménagement du périmètre. Le non-respect du planning de réalisation figurant dans la convention rend le concessionnaire redevable de plein droit sans mise en demeure préalable d’une pénalité journalière fixée forfaitairement à 2.000 euros par jour, l’ensemble des pénalités ne pouvant excéder 500.000 euros.
Mais : la gestion du chantier en fonction de la pertinence du phasage, ainsi que de la limitation des nuisances et incidences (emprise de la zone de chantier, sécurité, modification des circulations, etc.) – càd limiter les nuisances pendant les travaux n’est qu’un élément dans le critère Méthodologie (qui ne vaut que 10 points)
On indique dans l’annexe : Il y a lieu de maintenir au maximum le marché durant les travaux. Mais on ne demande pas une méthode comment le concessionnaire va réaliser cela.

4. La tarification

La même tarification tous les jours de la semaine (en dessous des prix en surface)
Les tarifs en semaine et en journée sont libres et risquent d’être élevés. En plus, ils seront, à terme, moins cher que les tarifs en surface (si ce n’est pas le cas, les gens vont toujours encore circuler pour essayer de trouver une place en surface !): donc augmentation des tarifs

Cout horaire : pourquoi pas un tarif par minute ! (à Barcelone, on fait ça)

5. Comité d’accompagnement . Il regroupera plusieurs services technico-administratifs de la Ville de Bruxelles.
Ce Comité, ainsi que le Collège de la Ville, doit approuver tous les plans. Aucune présence, ni des riverains, ni des commerçants ?

Cela vous aide peut être déjà un peu.

Si jamais je peux encore vous aider à renforcer vos messages, ou pour d’autres éléments, n’hésitez pas de me contacter.

Met vriendelijke groeten,

Anton Van Assche

Adviseur Brusselse Aangelegenheden & Arbeidsmigratie
UNIZO-Studiedienst

Des places publiques ou des places de parkings ?

Communiqué de presse de Pétitions-Patrimoine, 29/11/2014

Pétitions-Patrimoine se joint au concert de critiques qui voient le jour suite au projet de « piétonisation » d’une partie du centre-ville de Bruxelles. Pour l’association de défense du patrimoine, ce projet qui vise à créer une zone piétonne autour de la Grand-Place au détriment du reste du Pentagone ressemble à un mauvais rêve issu des années 1960, époque bénie de la bruxellisation. En effet, la philosophie qui sous-tend le projet paraît particulièrement rétrograde car il ne s’agit pas de protéger du trafic automobile un centre historique déjà saturé de voiture mais, au contraire, d’y amener plus de voitures en proposant de nouveaux parkings souterrains qui défigureront plusieurs places historiques (place Rouppe, place du Jeu de Balle, place de l’Yser et Nouveau Marché aux Grains). Ces parkings, confiés à des opérateurs privés, devront nécessairement être remplis au mieux pour assurer leur rentabilité, ce qui empêchera, par effet rebond, toute future politique volontariste de réduction du trafic.

Alors que la plupart des villes européennes mettent en place des politiques visant à protéger leurs centres historiques du trafic automobile et à inciter les visiteurs, chalands et touristes à laisser leurs voitures en périphérie et à y venir en transport public, la Ville de Bruxelles prône exactement l’inverse : amener les visiteurs – en voiture – au plus près d’un hyper-centre, certes piétonnier, mais qui est traité comme un simple shopping-centre, c’est-à-dire desservi par une sorte de mini-ring routier et entouré de parkings. Or, on sait que les centres anciens, avec leurs rues généralement étroites et non rectilignes, n’ont pas été conçues pour l’usage de l’automobile et que, historiquement, toutes les tentatives pour les y adapter ont été des échecs, créant plus de nuisances que de fluidité. On sait aussi combien la pollution atmosphérique due à ce trafic salit et dégrade la pierre et les matériaux des monuments et bâtiments historiques.

Du projet porté par la Ville de Bruxelles, Pétitions-Patrimoine dénonce surtout la mise à sac des quatre places historiques du centre vouées à accueillir les nouveaux parkings souterrains. En effet, la création de ces parkings s’accompagnera inévitablement de la construction de diverses cheminées d’aération et trémies d’accès. Ces dispositifs sont particulièrement encombrants et détruiront les proportions, circulations, perspectives et cohérences visuelles de ces places publiques, en particulier du fait que la plupart d’entre elles sont de taille plutôt modeste. Il suffit de voir les difficultés d’aménagement de la place de la Monnaie, littéralement coupée en deux par les trémies d’accès au parking qu’elle surplombe. Son espace est pourtant assez généreux mais il semble bien encombré par les dispositifs techniques du parking (bouche d’aération et trémies d’accès) qu’on a essayé, tant bien que mal, de masquer par des aménagements divers. On y voit aussi combien le cheminement des piétons est entravé par les deux voies d’accès au parking. Alors, va-t-on répéter les mêmes erreurs sur des places plus petites ? Imagine-t-on vraiment la petite place du Nouveau Marché aux Grains ou la symétrique et classique place Rouppe affublées de rampes d’accès à des parkings et dépourvues à jamais de toute possibilité d’y planter des arbres ?

abricouleur
L’abri anti aérien sous la place du Jeu de Balle.

Plus particulièrement, Pétitions-Patrimoine s’est penchée sur le cas de la place du Jeu de Balle qui possède des spécificités qui la rende particulièrement inapte à accueillir un parking souterrain. Tout d’abord, comme pour les autres places, il y a le problème des aérations et voies d’accès qui vont défigurer sont attrait historique et esthétique : simplicité, uniformité des matériaux de qualité (pavés), lisière d’arbres… Ensuite, le sous-sol de la place possède des éléments qu’il conviendrait de préserver pour leurs valeurs historiques : partie de l’ancienne usine de locomotive de la « Société du Renard » (1837) et un vaste abri anti-aérien pratiquement intact datant de la Seconde Guerre Mondiale. La place, achevée en 1863, abrite aussi le « vieux marché » quotidien depuis 1873. Le long chantier du parking et le réaménagement de l’espace de la place risque de mettre à mal ce marché populaire qui, avec son folklore et ses multiples anecdotes, fait partie de l’Histoire et du patrimoine immatériel de Bruxelles. Les Marolliens et nombreux Bruxellois qui pétitionnent et protestent en ce moment contre cette menace ne s’y sont pas trompés.

Pétitions-Patrimoine demande à la Ville de revoir la copie de son plan de piétonisation, tout d’abord en abandonnant l’idée de créer de nouveaux parkings souterrains dans le centre-ville. Ceux-ci sont inutiles, coûteux et destructeurs du patrimoine et de l’espace public. Ensuite, Pétitions-Patrimoine plaide pour un changement de philosophie du plan : s’il y a piétonisation d’une partie du centre-ville, cela ne doit pas se faire au détriment des autres quartiers du Pentagone et une politique générale de modération du trafic doit être mise en place afin de préserver ce qui fait la qualité d’un centre historique digne de ce nom.

Un piétonnier au centre-ville ?

Position du Comité de défense des habitants de Bruxelles centre concernant le projet de piétonnier centre-ville, 8 octobre 2014

Bien sûr, proposer un piétonnier au Centre de Bruxelles ne peut être reçu qu’avec sympathie, surtout après 56 ans du tout à la voiture, rien ou peu pour les piétons, les vélos, les transports en commun mais…

Tant que les autorités communales et en particulier son Bourgmestre Monsieur Mayeur refusent de présenter ou sont incapables de montrer des plans d’ensemble prenant en compte des études de mobilité (automobile, parkings, comptages, projections et analyses des nouvelles nuisances pour les habitants…), prenant en compte une proposition d’organisation crédible des transports en commun, prenant en compte les résultats d’une étude sur l’impact d’une création de zonings différentiés sur les commerces existants hors zone piétonne ainsi que ces habitants, prenant en compte un projet global sur le Pentagone, nous, le comité de défense des habitants de Bruxelles Centre ne peuvent que rejeter l’ensemble du projet.

Description du projet, d’après les informations à notre disposition :

Ce projet est prévu à Bruxelles qui est, d’après une récente étude, une nouvelle fois consacrée numéro 1 mondial de la congestion devant Londres, Los Angeles et… Anvers et ceci malgré les constructions d’infrastructures routières importantes et de nombreux parkings en son centre.

– Situé sur les boulevards centraux principaux du Centre Ville (place de Brouckère et la Bourse) et ses alentours directs, cette zone serait cernée par les rues de Laeken, des Poissonniers, Van Artevelde, des six jetons, des Bogards, des Alexiens, le boulevard de l’Empereur pour redescendre par la rue d’Assaut et la rue Fossé aux Loups.

– Ces voiries seront aménagées en doubles voies en sens unique, formant une petite « strootje » d’après le Bourgmestre Mayeur.

– Construction et augmentation du nombre de parkings publics autour du piétonnier.

– Ce piétonnier serait le plus grand d’Europe d’après nos échevins.

– Les motivations principales annoncées sont :

  • Ne plus avoir un boulevard mais une succession de places.
  • Attirer une autre activité économique dans une zone piétonne.
  • Bloquer le trafic de transit sur les boulevards du centre (30% d’après l’échevine de la mobilité).
  • Améliorer le confort. Remettre de la qualité et se la réapproprier.
  • L’aspect économique est essentiel.

Pourquoi ce projet en l’état est une fausse bonne idée !

– Les boulevards centraux sont les éléments les plus structurants d’un point de vue urbanistique dans le Pentagone et leurs accessibilités devraient êtres sauvegardés pour une lisibilité urbaine
au même titre que la rue Royale par exemple.

– La « petite boucle » pour l’échevine, la « strootje » pour le Bourgmestre, le « petit Ring Mayeur » pour les habitants, serait constituée dune double voie longeant écoles, crèches, parcs, rue commerciale… et ceci à la place de petites voiries, ce qui semble ingérable pour les riverains, voire extrêmement dangereux.

– La construction de parkings supplémentaires n’est envisagée dans l’ensemble des villes européennes qu’à l’extérieur de celles-ci et certainement pas au centre afin de décongestionner les centres urbains.

– Ce piétonnier serait le plus grand d’Europe malgré la complexité urbaine Bruxelloise. N’oublions pas que pour l’aménagement du centre de Bordeaux, l’étude a tenu compte d’une zone de 25 km de rayon afin de créer des synergies avec les quartiers environnants afin de ne pas perturber ceux-ci mais de mettre l’ensemble de la ville en valeur et rendre l’ensemble plus convivial.

– Concernant les motivations :

  • À l’origine, le boulevard était constitué d’une succession de places conviviales détruites et remplacé par un aménagement mono fonctionnel favorisant la voiture, l’accessibilité, le parking et les commerces…
  • Si l’ensemble des aménagements est de qualité et sans passé par l’exclusivité du piétonnier, les commerces y viendront (place Vendôme par exemple).
  • Bloquer le trafic de transit : tout le monde est pour. Mais pour éliminer les 30% de transit, il faudra détourner les 70% restants vers les quartiers aux alentours et saturer encore un peu plus ceux-ci et donc mettre clairement en péril la pérennité de ces quartiers tant pour les habitants que pour les commerçants.
  • La qualité et le confort dépendent en effet des aménagements tout en tenant compte de la mixité des usages.
  • L’aspect économique est évidemment important et pour cette raison, un projet tenant compte de l’ensemble du Pentagone serait certainement plus productif.

Des propositions possibles ?

– Organiser un péage.

– Des radars sanctionnant les transits dans le pentagone (entrées et sorties).

– Un aménagement généralisé dans l’ensemble du Pentagone comme dans d’autres villes supprimant les différentiations trottoirs – voiries, et qui tienne compte de l’ensemble des usagés urbains : piétons, vélos, transports en commun, voitures, livreurs et qui apporterait donc plus de convivialité à l’ensemble des usagés : habitants, commerçants, travailleurs, touristes, consommateurs… Les multiples zones piétonnières se verront ainsi aménagées quasi naturellement et recevront de manière douce de multiples pôles commerciaux.

Ou…

Notre étonnement !

– On présente déjà l’aménagement des espaces de manière détaillée (29/9).

– Des espaces, on ne sait pas encore lesquels (place De Brouckère ou sur la Bourse), seront dévolus à des évènements « culturels »(29/9). On imagine déjà les grands écrans, la musique forte, et les kermesses imposées.

– On parle des enseignes commerciales déjà sollicitées (29/4).

– À ce jour, nous ne connaissons pas les propositions de la Stib pour la réorganisation de son réseau, sachant qu’il s’agit la plus grande gare de bus à Bruxelles. Le bourgmestre Mayeur propose comme alternative l’utilisation d’une autre société le transport en commun dans le Pentagone (29/9)…

– Nous allons assister à la création d’une zone mono fonctionnelle en opposition au reste du Pentagone alors que les décideurs de l’ensemble des villes européennes privilégient la diversité et la mixité.

À Bruxelles, quels sont les piétonniers importants qui n’ont pas fait fuir leurs habitants ?

Le Bourgmestre Monsieur Mayeur nous dit que tout est décidé.

Mais nous vous le demandons, Monsieur le Bourgmestre, prenons le temps de la réflexion ! C’est indispensable et démocratique, personne n’en mourra.

Parkings basta !

Un texte de Marie-Laure Béraud

Nous le savons tous la voiture n’est pas l’avenir de l’homme.

Bruxelles est une ville où la circulation est un cauchemar. En effet même à Paris elle est beaucoup plus fluide et je pense qu’une des raisons est l’existence de couloirs pour les bus et les taxis que rien ne vient obstruer, du coup un grand nombre de parisiens utilise ces moyens de transport car ils sont fiables. Bien sûr il y a aussi le métro.

A Bruxelles, puisque c’est ce qui nous importe, circuler en voiture à peu près à n’importe quelle heure de la journée relève du parcours du combattant, bouchons, travaux sans fin, incivilités des conducteurs et j’en passe. Il y a dans cette ville je ne sais combien de gares reliées au métro et aux bus, des parkings en pagaille pourtant à moitié vides voire moins que cela encore. Un des problèmes tient à la paresse des usagers qui préfèrent se garer en rue plutôt que d’utiliser ces parkings notamment le soir où la rue est gratuite. Le fait est aussi que le prix des parkings est il faut bien le dire assez dissuasif. Partons alors du principe que si tu veux absolument prendre ta voiture il y a un prix à payer sinon tu fais un peu marcher tes jambes ou tu prends ton vélo.

La nouvelle atterrante de l’implantation de nouveaux parkings en ville ne semble faire sourire que notre bourgmestre et d’autres de ses comparses. Des chantiers qui bouleverseraient la vie des habitants, des travaux gigantesques pas du tout adaptés aux lieux choisis et notamment celui prévu place du jeu de balles où des dizaines de marchands sont là tous les jours sur cette place charmante, lieu de convivialité. Les rues alentour sont étroites et déjà difficilement praticables par les brocanteurs en camionnettes, dès lors pour entreprendre des travaux d’une telle ampleur comment ne pas défigurer le lieu lorsque d’énormes machines seront à l’oeuvre ? Pour flanquer 6 niveaux de garage dans un sous-sol gorgé d’eau ? Que feront les marchands dans un tel foutoir ?

Pourquoi les visiteurs ne s’arrêteraient-ils pas Gare de la Chapelle à proximité ou encore au métro porte de Hal et pour les inconditionnels de la voiture deux parkings existent à proximité qui ne sont pratiquement pas utilisés. Ce projet est inutile comme les autres car il incite à aller à contre courant d’une philosophie du mieux être sans pollution. L’époque de tout à la voiture devrait être terminée depuis longtemps vu les enjeux écologiques. Madame Els Ampe a dû se tromper d’époque, faut-il lui rappeler que nous sommes au 21ème siècle et qu’il n’est pas possible de se comporter comme au temps des trente glorieuses ? Que fait monsieur Mayeur bourgmestre à part s’imaginer de beaux boulevards plein de touristes, une manne pour le commerce avec encore cette vieille idée de consommation frénétique ? A-t-il la moindre idée de l’ampleur catastrophique qu’engendreraient de tels travaux pour les riverains ? S’en soucie t-il ? Pense-t-il autrement qu’en terme de rentabilité, de profit ? Et Pascal Smet avec ses copains architectes il pense à quoi ?

Est-ce que par exemple Mr Huillard PDG de Vinci (40 milliards de chiffre d’affaire en 2013) travaille aussi à la construction de pistes cyclables? Parce que si c’était le cas tout cet argent inutilement dépensé pourrait servir à cela entre autres, histoire de faire évoluer les comportements. Par ailleurs je serais curieuse de savoir à combien s’élèveraient ces inepties car il me semble que c’est grâce au contribuable que de telles actions sont entreprises et à partir du moment où les citoyens paient leurs impôts il me paraîtrait très opportun qu’ils aient leur mot à dire. Par temps de crise il serait temps de penser aux humains plutôt qu’aux parkings et s’affairer à de tels projets inutiles est d’un cynisme éblouissant. Les politiques doivent cesser de prendre les contribuables pour des vaches à lait au service de leur mégalomanie.

Depuis déjà des décennies Bruxelles est ravagée par des promoteurs sans scrupules avec la complicité des politiques et cela doit s’arrêter, Bruxelles ne leur appartient pas en particulier, Bruxelles est notre ville à tous et nous voulons la garder avec ce qui lui reste d’authenticité et de charme.

Bruxelles ma belle…

Un texte de Jan Bucquoy

Le centre ville de Bruxelles se vend sous le nez de ses habitants qui sont refoulés vers des communes pauvres qui deviendront à leur tour la proie des promoteurs. Les habitants exsangues par les loyers insupportables finiront dans des caves humides ou s’entasseront à 20 dans 20 m2.

L’impuissance où nous sommes à rendre coup pour coup illustre une difficulté plus générale: le capital ne nous offre plus de point d’appui, de visage, de cible compacte. Nous cherchons des barons, deux cent familles riches ou des maîtres du monde et nous ne trouvons qu’un ramassis de managers cyniques payés au pourcentage qui gèrent des fonds de pensions californiens. Ils avancent masqués, conquièrent de nouveaux espaces, des continents inconnus. Ils nous colonisent.

Les habitants de cette ville sont les nouveaux esclaves d’un règne nouveau. Ces managers se sont emparés de notre langage et de notre imaginaire. La restructuration capitaliste n’a pas frappé l’usine sans frapper, dans un même temps, le reste, c’est à dire la ville et l’habitat.

Le centre ville avec ses piquets et barrières sur le trottoir, les ronds points à fleurs, la rue aux pitas près de la Grand-Place de la capitale canalisent les habitants vers les ghettos commerciaux de la rue Neuve. Transformés en mobilier urbain, les habitants et leur vie deviennent de la valeur marchande et utile et sont uniquement considérés en acheteurs potentiels. Cette ville aux petits loyers s’est transformée en îlot privilégié d’eurocrates aux salaires gargantuesques plongeant ses habitants sous le seuil de la pauvreté.

Plus de place donc pour des Dolle Mol, les Marolles, des cafés populaires ou d’autres lieux de replis et de résistance à ce monde qui n’a retenu de 10000 ans de culture que vendre, acheter et faire du profit. Déjà au XIX ème siècle, Bruxelles, capitale de la liberté d’expression accueillait les plus grands noms de la contestation y étaient chez eux: Marx, Engels, Bakounine, Victor Hugo, Baudelaire, Rimbaud, Verlaine…

Car Bruxelles brusselait. Cette ville créait des liens de parole et de parenté, liens de souvenir et de l’intimité. Habitudes, usages, solidarités. Tous ces liens établissent entre les humains et les choses, entre les lieux, des circulations anarchiques sur quoi la marchandise et ses promoteurs n’ont pas directement prise. L’intensité de ces lieux les rend moins exposés et plus impropres aux rapports marchands.

Dans l’histoire du capitalisme, cela a toujours été le rôle de l’État que de briser ces liens, de leur ôter la base matérielle afin de disposer les êtres au travail, à la consommation et au désenchantement.

Les nouveaux cafés sont des lieux de solitude.

Bruxelles s’entoure d’un désert administratif et crée une société de déracinés. Les quartiers populaires sont envahis par des nouveaux bourgeois, élite européenne qui rem-place les habitants humains avec leurs cris, odeurs, bagarres, complicité. Ce n’est qu’une question de temps, les loyers augmentant et les anciens bâtiments industriels étant massivement changés en lofts spacieux, la nouvelle population prendra la place de l’ancienne (voir les Marolles et l’arrivée du Sablon).

Le garage deviendra un dancing couru de tous et l’ancienne filature servira des déjeuners plus bio que nature.

Bruxelles participe d’une guerre. D’une guerre d’anéantissement. Tout se passe comme si la bataille se livrait et que nous n’avions pas pied sur le terrain d’affrontement. Comme si c’était la dimension même de la guerre qui nous échappait. Comme si nous reculions devant l’élément même sur lequel opère désormais, le capital. Cela vaut mieux pour les quartiers et cela vaut pour les amitiés; parmi les camarades, combien de complices avons-nous dû laisser pour mort sur le front esthétique? Combien, lassé de l’agitation comme de la paralysie militante, s’abîment aujourd’hui dans la culture?

Les promoteurs considèrent l’espace urbain à la fois comme un tissu marchand, un espace soumis à la production des marchandises et comme une devanture, une réclame.Espaces publics et immeubles majestueux se convertissent en emblèmes et symboles de la réussite des nouveaux riches.

Les espaces urbains vivables se réduisent. Les trottoirs et ses piquets empêchent de se promener la main dans la main, de traîner, de vadrouiller, de s’engueuler. Tout est construit pour faire son shopping. Que le peuple de Bruxelles se rassemble, que ceux qui s’y reconnaissent soient les bienvenus.

La ville n’est pas à vendre, la ville est là pour qu’on y vive.